Un dialogue urgent à rétablir.
C’est un soir de première au Théâtre Charles Dullin de Chambéry pour Pauline Ribat, Florian Choquart et Lionel Lingelser. Commençons par respirer tous ensemble, comme un temps de préparation consacré à des valeurs importantes, à des sentiments intimes qui vont être mis en jeu.
À l’aube, il y avait trois genres – le féminin, le masculin et l’androgyne –, ce sont les enfants des astres qui furent affaiblis et séparés par les dieux. Dans ce premier rapport mythologique, ils sont en quête, de l’autre, de l’amour et, d’un dialogue qu’il est important et urgent de rétablir.
Raconter les petites et grandes violences envers les femmes, tel est le défi qui est lancé. Des témoignages de l’agression verbale devenue ordinaire sont énoncés : du « t’es charmante » à la dérive presque acceptée, puisque monnaie courante mais tout à fait inacceptable du « t’es une pute ». Cela reflète des faits du quotidien auxquels on ne prête même plus attention parce que chacune mais aussi chacun – la violence envers les hommes demeurant encore plus sous silence – peut être victime de ce type d’agression dans la rue. Mais il n’y a pas que la rue. Lorsque l’on bascule dans la vie d’un couple et de leurs relations sexuelles montrant un crescendo de la brutalité verbale et physique de l’homme envers la femme. Ce moment très fort, un peu comme le point d’orgue de la pièce, met en avant l’influence de la violence naissant dans un foyer, dans la sphère intime, pour arriver dans l’espace public, visible par tous si l’on veut bien regarder.
Les comédiens ayant gardés leurs propres prénoms sur scène amincit la frontière entre la fiction du plateau et la réalité de la vie. Il faut également pouvoir être en mesure d’entendre ce « parler cru » qui est dit dans l’énumération de scènes de viols ou dans la lecture de témoignages sur l’excision. Cela est rendu possible par les passages musicaux viennent contrebalancer la dureté des mots par le décalage, l’humour tout en ayant une vraie fonction dramaturgique comme une autre prise de parole apportant une touche de poésie nécessaire.
Depuis l’aube (Ode aux clitoris) balaye des sujets très larges liés à la sexualité, au rapport à l’autre en poussant à s’interroger sur des comportements qu’il est essentiel de faire évoluer.
Photographie à la Une © Victor Tonelli.