Portraits de femme.
LIVRE « La photographe » par Diane Chateau Alaberdina aux Éditions Gallimard, Collection Blanche.
La photographe héroïne de ce superbe roman grandi dans l’admiration d’Agafonova, écrivaine autour de laquelle gravitait toute la diaspora slave de l’Archipel Café, et de sa fille Taisiya. On ne voit d’abord dans ce livre et ne voyant qu’un bout la portée de l’histoire où l’on apprend qu’on pourrait devenir fou pour ne pas avoir fait la folie en temps voulu. Et dans un monde sans gravité le seul salut est d’être une belle insensée. C’est pourquoi lorsque l’héroïne et la fille d’Agafonova se retrouvent à l’âge adulte celle-ci devient son modèle.
Un jeu ambigu se met en place entre la photographe. Un étrange ménage à trois se met implicitement en place : il y a les deux femmes qui se font face mais aussi l’ombre de l’écrivaine dont l’allure se mêle à celle de sa fille. Et tout se passe alors comme si la beauté de certaines oiselles n’était visible que depuis une cage. Mais c’est alors un mal nécessaire, un pont de pierre que les amantes franchissent fortes de ce qu’elles ont dans le cœur et le corps lorsque le désir les traverse. Preuve que parfois, pour mieux voir et photographier, il faut fermer les yeux.
Le temps qui a passé n’est même plus une excuse et les trois femmes vivent sans qu’elles le sachent sous un même ciel. Si bien que la vérité de l’amour devient une collection de choses incroyables. La persévérance est pour la photographe l’échelle atteignant le ciel même si une fois atteint il semble fait de poussière et d’égarements. Mais la sagesse n’est pas dans le nombre de ses mots. Pas plus que le cadre où elle met le portrait de son modèle. Qu’importe si les feuilles tombent à chaque automne à défaut de paroles il existe les plaisirs visuels des cannibales.
Image à la Une © Éditions Gallimard.