Je me sens partir
guetter qu’on me traverse
J’étais encore assis à poser ces questions à l’attente
Je me sens partir
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Aujourd’hui le don
Je n’eus rien ni jamais à offrir
Je porte
À tes lèvres
Le gant-brûlant-qu’est-ton-coeur à te redire mille fois comme
Amoureuse l’on redit au père
Qu’on l’aime
Jamais plus se voir offrir d’un baiser
l’emballage
Et ne plus te répondre non plus : offrir toucher
c’est cela que je reporte : ma voix aux confins d’un autre qui parle
J’ouvre ma bouche afin qu’un vent l’emplisse
J’ouvre ma bouche aux pluies nordiques
À des froids en femmes longues
Au charbon de couleur qui peint sur la neige
La mémoire de mes pères de mes mères de mes sœurs
Au cri étouffé d’un poing d’une statue de Reiner
Cri qu’on étouffe pour éviter des hosannas qui
S’échappent pour autant
Me sens partir et
Aujourd’hui
Notre don des désinences
J’habite une grammaire invisible
Notre terminaison d’un élan
Summum d’un puits qui s’ouvre haut
tandis qu’un nôtre s’épuise au fond et dans une eau
Qui stagne Dans l’eau
Tranquilles
Nous reposons
Notre besoin d’un passé pauvre
Notre bonheur affolé
Qu’un mot l’achève
Nos contrées à transmettre aux pays du langage
Un mot parachève ma vie
que tu prononces et que j’ignore encore et dans mon
Ignorance
Je fais un tour d’avoir fini
Et je finis une phrase avec un œil visant ton verbe
Je retourne la terre et déterre un secret :
J’ai plusieurs os qu’on se partage entre
Nouveaux squelettes
Chacun nourris aux vers de vase
Mon secret se garde seul
Je me protège du temps
En clignant des yeux au soleil