La dernière muse et avant.
« Araki Nobuyoshi », Éditions Gallimard publiée sous la direction de Jérôme Neutres, 304 pages, 39,90 euros et aussi « KaoRi », Chez Higgins, Montreuil.
Exposition au Musée Guimet du 13 avril au 5 septembre 2016.
Araki s’est souvent plaint que dans l’art contemporain il y avait trop de robots et pas assez de chair. L’artiste a toujours su rétablir l’équilibre. Et ne s’en est pas priver. Chair humaine (féminine) et pulpe des fleurs sont des épitaphes contre la fin du monde. Cela n’est pas nouveau chez lui : « À peine sorti du vagin de ma mère, je me suis retourné pour le photographier!» déclarait-il avec son humour.
Sidéré par le sexe, le désir, la vie et la mort, pour l’artiste la femme est le seul sujet (avec les fleurs qui lui servent de métaphores) : elle est captées libre ou ligotée par celui qui reste un des maîtres du bondage nippon contemporain. Il a trouvé dans KaoRi sa dernière muse. Manière d’oublier Yoko Aoki l’épouse dont il raconta en image le voyage de nonce comme celui du départ. Avec KaoRi il multiplia les techniques afin de réaliser ses prises de manière compulsive allant jusqu’à prendre des centaines d’images en un seul jour de son dernier « printemps ».
Le bondage reste pour lui un moyen de ficeler le réel plus que ses modèles : « c’est parce que les âmes sont intouchables que je veux ficeler le visible. En prendre possession pour moi seul» dit celui pour lequel le médium et les techniques de prises deviennent les préliminaires de l’amour. Preuve que la femme pour elle n’a rien d’un spectre. Néanmoins chaque photographie devient les moments d’opérations pour atteindre la complétude qui porte au delà de la souffrance. Surgissent le silence de l’âme et surtout le bruit de l’inconscient qui trouvent enfin ses propres images. Le désir sort par le ventre, le visage. Il a besoin dans une telle œuvre d’espace, de rencontre. Il ne se complait pas en lui-même. Le corps en déborde. Et Araki fait entrer dans de flux d’existence.
Dès lors KaoRi lance son corps (en connivence avec l’artiste) comme un coup de dés. Chaque fois il fait trembler les sphères d’en bas, la terre d’en haut. L’artiste oblige à chercher où est le corps, le « vrai », où sont sa sensibilité, son être. Les photographies figurent comment le corps à de quoi exister : à la fois par l’idée et la caresse. Elles deviennent l’activité qui montre ce dont le corps est plein. C’est pourquoi il est parfois est balafré, troué, ouvert et recouvert. Oui il ose être ouvert, discerné afin que chacun ne vive plus sans exister.