ShadokOrama

EXPOSITION « ShadOkorama » jusqu’au 15 octobre 2018 au Musée-Château d’Annecy.

Impertinents, absurdes et loufoques, de drôles d’oiseaux envahissent le Musée-Château d’Annecy pour un jubilé en grande pompe.

A priori les Shadoks sont des oiseaux avec de toutes petites ailes ridicules qui pondent des œufs… mais comme ils sont hauts sur pattes, quand ils pondent, leurs œufs se cassent. Avoir des œufs en fer serait une solution… mais les oisillons ne pourraient pas sortir. Des œufs qui rouillent seraient une autre idée… mais le temps que l’œuf rouille, le petit naîtrait déjà vieux. La vie d’un Shadok est assurément compliquée. D’autant plus qu’il n’existe pas de « Shadokette », ce qui pose un réel problème pour assurer la survie de leur espèce. Pour se reproduire, un Shadok doit compter jusqu’à quatre… mais son cerveau n’a que quatre cases. Comme il y a toujours quelque chose dans une case, pour faire de la place, il faut oublier. Donc quand les Shadoks se mettent à pondre, ils n’ont plus aucun souvenir. Absurde et sans fin ? C’est tout l’esprit loufoque et impertinent des Shadoks qui est à découvrir au Musée-Château d’Annecy pour un jubilé en grande pompe.

L’histoire d’une série hors-normes.

Il y a cinquante ans, le 29 avril 1968, juste après le journal télévisé, les Français découvraient une toute nouvelle série d’animation, Et voilà le Shadok, créée par Jacques Rouxel et mise en voix par Claude Piéplu. Une partie des téléspectateurs fut scandalisée par ces drôles d’oiseaux mais Jacques Rouxel s’est toujours défendu de vouloir prendre position ou d’avoir un propos politique ou social. Ayant très vite disparu des écrans en raison de la grève générale liée aux évènements de mai 68, les Shadoks sont revenus dès le mois de septembre. Trois autres séries ont été diffusées par la suite en 1970, 1974 et la dernière, Les Shadoks et le Big-Blank, en 2000, peu de temps avant le décès de Jacques Rouxel (le 25 avril 2004).

Les Shadoks sont les témoins parodiques des époques qu’ils traversent car beaucoup d’allusions à nos sociétés contemporaines viennent pimenter les 208 épisodes. Avec près de 300 œuvres, l’exposition ShadokOrama retrace à la fois l’histoire des Shadoks et rend un vibrant hommage à Jacques Rouxel qui a marqué le milieu de la télévision tout comme celui du cinéma d’animation. Le parcours de l’exposition est conçu de façon temporelle et s’articule autour de deux thématiques centrales : « Le monde qui a vu naître les Shadoks » et « L’épopée des Shadoks ».

© Jacques Rouxel.

Le monde qui a vu naître les Shadoks.

L’action de la première série des Shadoks se situe « il y a très très très longtemps ». Un passé lointain est bien la première impression que le visiteur de ShadokOrama peut ressentir. En effet, les Shadoks font leur apparition dans les années 60, une époque où la télévision est un réel investissement et où celle-ci tient une place importante dans les foyers. Seules deux chaines contrôlées par l’Office de radiodiffusion-télévision française (ORTF), symbole du monopole de l’État, sont accessibles. Malgré cette dépendance à l’État, l’une des sources de la série est le Groupe de recherches musicales, fondé par Pierre Schaeffer en 1958, essentiellement tourné vers la musique concrète. La musique ayant un rôle prépondérant dans les Shadoks, les spectateurs de l’exposition sont invités à créer leurs propres compositions sonores avec des instruments bizarres et insolites.

Ce « monde qui a vu naître les Shadoks » est aussi celui de la conquête de l’espace, un temps où la science-fiction tient une place prépondérante dans les arts : cinéma, bande dessinée, littérature. C’est ici l’occasion de découvrir le musée-bibliothèque imaginaire de Jacques Rouxel afin de plonger dans ses influences artistiques, son univers intellectuel. La question du travail est également très présente dans les Shadoks, quand on dit « pomper », c’est le travail qui est mis en évidence ainsi qu’une certaine absurdité de celui-ci : « Je pompe donc je suis ».

© Jacques Rouxel.

L’épopée des Shadoks.

Autres devises « shadokiennes » : « Pourquoi faire simple quand on peut faire compliqué ? » ou « S’il n’y a pas de solution, c’est qu’il n’y a pas de problème. » ont imprégné la culture française. Dans cette « épopée des Shadoks », le visiteur pénètre dans l’atmosphère de la série en baignant dans les principes des Shadoks – avec de nombreux documents originaux – et en suivant les évolutions des techniques d’animation – avec notamment une machine « infernale », l’animographe.

L’exposition ShadokOrama est conçue de façon ingénieuse ; elle marque par sa liberté de ton, de forme, à l’image de ces drôles d’oiseaux.

Image à la Une © Musées d’Annecy. Dessins : Jacques Rouxel, les Shadoks © aaa production – Graphisme © Mathilde Meignan.

Kristina D'Agostin

Rédactrice en chef de Carnet d'Art • Journaliste culturelle • Pour m'écrire : contact@carnetdart.com

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