le cri musical de plusieurs générations.
Inclassables, ils sont le nouveau souffle de la scène musicale francophone. « Être une personne fauve », ils se le répètent sans cesse et nous le crient avec la douleur de la lucidité des poètes. Nous les avons croisés, « Cool Carnet d’Art » comme ils disent, et relatons l’extrait d’une longue et belle rencontre…
Qu’est-ce que vous voudriez que l’on retienne de Fauve après votre mort ?
Rien. On voudrait que les nôtres retiennent que même si on est des gens un peu erratiques et bancals, on a été des gens tenaces et combatifs qui ont cherché une forme d’amélioration d’eux-mêmes. Quand on se projette dans vingt ans, le seul truc qu’on se dit c’est que ce sera cool quand j’aurai des petits-enfants et que je pourrai leur montrer des photos ; « Papy il est un peu vieux, il est un peu con mais quand il était petit, il avait un groupe, et il a vécu une aventure qui était chouette… ».
C’est très égoïste comme démarche, mais dans un sens c’est sain. On fait les choses pour nos gueules. Ce qu’on dit c’est ce que tu te dis à toi-même pour te botter le cul quand tu perds un peu espoir, quand tu n’arrives pas à parler à ton frère ou à cette fille dont tu es amoureux… Tu leur dis en chanson. Ce sont des monologues sous la douche et je ne vois pas en quoi ça pourrait entrer dans la postérité. Si ce sont des propos que des gens s’approprient, ce n’est pas à nous qu’ils vont penser mais à leur vie. Si ce truc là devient utile à d’autres personnes que nous, c’est très beau et on ne va pas s’en plaindre, mais ce n’est ni ce qu’on veut ni ce qu’on espère. Si Fauve perd cette fonction d’exutoire pour nous, même si ça touche toujours plus de monde, on a tout perdu. Parce que c’est une vraie soupape, et que si on ne l’a plus, on est moins bien, tout simplement. On veut juste vivre le plus longtemps possible et creuser en se disant qu’on a avancé, qu’on a progressé, et peut-être même qu’on est devenu des gens bien.
Fauve c’est aussi un espace dans lequel tu peux dévoiler des choses qui font partie de ton intimité. L’idée c’est de mettre nos egos de côté, donc ça serait complètement contradictoire d’arriver à ce que Fauve devienne un vecteur pour nos egos… Il n’y a pas d’ambition pour Fauve, il y a des ambitions pour nous et Fauve est un moyen d’y arriver. Ce n’est pas une fin en soi, c’est une béquille, une lanterne, on fait Fauve pour aller mieux dans nos vies à nous.
Notre quête, c’est d’être des personnes fauves, c’est-à-dire des gens qui pissent droit, qui sont capables d’aimer et d’être aimés. Fauve c’est un moyen, c’est une thérapie de groupe. Je vois des gens autour de moi qui vont courir pendant une heure et qui reviennent tout transpirant mais bien… Ils ne veulent pas pour autant être sportifs professionnels, parce que ouais, ça fait chier de courir. Nous c’est pareil, on se retrouve et on fait Fauve, pour être bien.