Pourquoi j’ai toujours détesté Robin Williams

Pourquoi j'ai toujours détesté Robbin Williams

Robin n’aurait jamais dû voir le jour. Il est désormais retourné dans les jardins de la conception, cet espace-temps avant l’enfance. Un lieu de pleine vacuité. Peter Pan était de toute façon un gamin condamné, il aurait dû s’en tenir, tout comme nous,  à l’état de larve. La fin ne devrait pas être redoutée puisqu’elle se résume au silence, à une mémoire morte où les émotions, les sensations et les pensées sont bannies ; voilà l’instant d’éternité regretté, cet instant avant notre naissance.

Robin n’aurait jamais dû voir le jour. Il a tué Peter Pan l’imbécile ! Il lui a donné le visage d’un homme sensible, creusant des rides sur la ronde douceur de l’imaginaire, des sillons d’histoire sur la poitrine. Depuis ce jour, je ne rêve plus. Et j’attends encore qu’un ami imaginaire m’emmène dans d’autres contrées. Par la fenêtre, la promesse d’une jeunesse perpétuelle, une simple enjambée. Enfant je ne dormais déjà plus. Fallait-il alors qu’une personne viennent veiller sur mon sommeil quand mes parents ne pouvait déjà plus me supporter ? Là encore, le goût reste amer. Robin a transformé ma nounou en transexuel pervers. Sans rêve d’immortel, sans repos nocturne, ne reste que la lecture. Fini les dessins animés, les jeux de société, je saoulais ma conscience de vers pompeux, engluais mon esprit de rimes qui ensablaient mes yeux. Ce nouveau cycle fut une nouvelle fois détruit, le cercle fut rompu. Robin a enfermé les poètes dans une grotte humide, réduit les ascètes du langage en une bande de mouches sordides, agglutinées devant un feu trop clair.

Robin n’aurait jamais dû voir le jour, et Dieu n’a pourtant pas compris ma prière. Il a enlevé à l’art un voleur de rire, un voltigeur d’imaginaire. Triste bouffon recherchant l’amour, il nous laisse aujourd’hui sans repères, enfants orphelins d’une génération envoutée par ce regard paisible, ces mimiques risibles, désormais sans lumière. Je déteste ce Shakespeare aux airs de Robin. Il a incarné mes plus beaux songes, apaisé mes craintes du devenir, susurré à mes oreilles trop tendres qu’un beau jour je devrai grandir. Promesses dans lesquelles nous avons cru, et avec lui, au lendemain du silence, tout a disparu. Oui, Robin n’aurait jamais dû voir le jour, car depuis que je suis né, depuis mon premier rire, je n’aurais cru qu’il pouvait mourir.

Killian Salomon

Rédacteur / Auteur

2 Comments

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    Répondre août 12, 2014

    Anita Brito

    Bravo !

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    Répondre août 16, 2014

    martelin

    belle écriture. le cinéma fait rêver d’accord, tu aurais bien besoin de voir un psy parce que si ta vie tient à l’image diffusée par le cinéma……………………..moi j’adorais Robin Williams je l »adore toujours d’ailleurs. la part entre l’acteur et l’homme n’est pas la même, quand on connait sa cellule parentale et sa prise de conscience sur sa maladie qui allait empirer; je trouve là un homme très courageux d’avoir pris la décision d’en finir; c’est son choix et nous devons le respecter et peut être l’accompagner dans sa décision et son acte qui ont été mûrement réfléchis. il nous a tant apporté maintenant à notre tour de lui apporter l’énergie nécessaire pour son chemin dans l’au-delà.

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