Elena Anasova

La liberté offusquée.

Dans les prisons de femmes (mais dans les autres aussi) le soir ne rend pas les murs plus discrets. Un œil ne prend jamais congé des femmes : il ne quitte jamais leur ombre, les « couve » de son regard de fauve. Ce n’est pas du cinéma. Ignorant la frontière de l’intime et ses cryptes de silence la surveillance organisée devient le paltoquet du froid où l’être se vide tout.

Elena Anasova (4)

Pour le mettre à nu Elena Anasova a visité pendant plusieurs mois les prisons de femmes en Sibérie. Elle a ainsi dénoncé ce qui cache, en Russie, derrière une l’exultation romantique de la vie carcérale. Elle prouve combien cela reste bien plus une vue de l’esprit qu’une réalité : d’entre les murs la vie est privée d’intimité ce qui n’empêche pas – au contraire – une exacerbation des luttes de pouvoir, des antagonismes, des relations, des renoncements souvent douloureux.

Elena Anasova (2)

Les photos sont cruellement parlantes et fascinantes. Face à l’œil inquisiteur des gardes chiourmes la photographe oppose celui de son regard. Il est bienveillant. Mais Elena Anasova fait plus : la prison devient le parangon de nos sociétés dont les technologies de surveillance scrutent tous les aspects de notre vie même la plus intime.  Chacun y est suspect, aucun n’est préservé. À la nudité imposée (parfois) aux prisonnières répond la mise à nu, par la bande, de ce qui nous attend.

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L’artiste montre toutefois comment les prisonnières tentent de s’isoler (seule ou en couple). Chaque photo caresse une douleur silencieuse et parfois des amours. Une femme se serre contre une autre là où l’œil anonyme cloue  leurs abattis. Et si certaines femmes sont prostrés d’autres tentent de « rire » du voyeurisme  « abstrait » non pour s’en moquer mais pour permettre à l’existence de se poursuivre tant que faire se peut.

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