Accords et désaccords.
« Faux-semblants », Chez Higgins, Montreuil, « Magnet River », Royal Book Lodge.
Juli Susin rappelle une évidence : « montrer pour découvrir ». Elle sait aussi que l’invention du moi en est une conséquence. C’est là le cœur théorique de l’approche de la créatrice. Ses œuvres sont à la photographie ce que les fragments de Nietzsche sont à la philosophie : elles contestent l’« Immaculata » des dogmes et permettent des confrontations aussi communicantes qu’intempestives. L’artiste traite certaines vieilles images comme contemporaines. Mais l’inverse est tout aussi vrai. Demeure une succession d’enjambements, d’accords et désaccords plastiques qui ironisent le monde comme l’art à partir d’un double matériau: l’archive et la création.
Le souvenir, ses perceptions, sa formation, sa déformation par la confrontation au présent offrent des narrations qui deviennent des investigations véritables «Thinking-while-watching» chères à Wittgenstein. Elles convoquent et imbriquent de manière spéculative, l’art, la littérature, l’épuisement des métaphores et des raisonnements logiques. À travers l’œuvre se repose une question essentielle : que voit-on quand on montre l’être ou le réel ? Afin d’y répondre l’artiste poursuit l’« archi-image ». Elle refuse la propension à croire coller la photographie au réel. Il s’agit plutôt de l’arracher non par un appareillage de référence mais dans un montage. Il serre chez de plus près les réels détours de la réalité ou des réalités (pour être plus juste). Les photographies indiquent des irrationnels qui accompagnent des axes de l’imaginaire de la créatrice.