Komili

EXPOSITION « Komili, peintures & Jean-Paul Moscovino, sculptures » du 14 mars au 20 avril 2019, Galerie Ruffieux-Bril, Chambéry.

Paysages naturels ou environnements urbains, l’artiste donne une vision sensible et intimiste de lieux qui semblent habités par une universalité.

Comment votre histoire avec la peinture a-t-elle commencé ?

Vers l’âge de 19-20 ans, j’ai compris que le défi que je voulais relever dans ma vie était celui de la peinture. C’était ce que j’estimais comme le plus difficile à faire. Avant, je n’avais pas le courage de me l’avouer mais, une fois mon choix fait, j’ai commencé à prendre des cours. J’ai fait différentes écoles, dont celle des Beaux-Arts d’Angoulême, j’ai suivi un cursus universitaire en muséologie et à la fin de mes études, il fallait que je peigne.

Depuis quelques années je suis sélective sur la présentation de mes toiles au public. Je crois que c’est une erreur de vouloir montrer trop de choses et j’essaye de ne pas cumuler trop d’expositions pour pouvoir choisir ce que je produis. Le choix est important.

Quels travaux de recherche avez-vous en cours ?

Mes sujets dépendent beaucoup de mes rencontres avec les lieux. Par exemple, je suis tombée sur une fête foraine abandonnée que j’ai trouvée très intéressante et j’ai commencé à travailler là-dessus. Ce sujet est compliqué, voire dangereux, car il s’avère assez narratif et j’essaye de trouver un équilibre entre la narration et l’abstraction. J’ai aussi un sujet en cours sur les carrières où là ce sont la matière des pierres et les lieux de stockage qui m’attirent. D’autre part, les membres de ma famille commencent à arriver dans mes toiles, à rentrer dans mes plans. Je commence donc doucement à les intégrer, c’est une de mes préoccupations car quand on introduit un personnage, qui raconte énormément par lui seul, il est difficile de garder un côté abstrait ou organique.

Dans mes tableaux, le sujet récurrent est le paysage. Dans ceux-ci, les plans et les cadrages sont très importants. J’ai une vision très cinématographique. Je prends souvent des photos, c’est mon moyen de repérage qui me permet d’inventer, d’interpréter quand je suis dans mon atelier. Ce qui m’attire est fuyant comme, par exemple, la lumière qui n’est parfois présente qu’à des moments bien précis. L’acte photographique qui précède le tableau est très conscient de ce qui va suivre. Si j’inventais les lieux ce serait beaucoup plus simple mais la réalité est beaucoup plus riche.

J’aime le côté documentaire de ce que je veux faire car je rencontre et raconte des lieux. Ce que je vois est essentiel pour moi, ça existe et c’est beau. Je peins des paysages qui nous regardent, ils ont une présence et deviennent comme des individus. Si une toile n’est pas habitée c’est que je n’ai pas réussi ce que je voulais dire, c’est qu’elle est ratée.

À quel moment se rend-on compte qu’une toile est terminée ?

C’est au moment où la toile décolle. Jusqu’au bout, elle peut être très bien mais elle n’a rien dans le ventre. Quand je la regarde il ne se passe rien, je sens qu’il y a quelque chose qui me dérange, jusqu’au moment où je mets la bonne touche comme la couleur qui manquait par exemple. Là, tout de suite, je vois que la toile est terminée, elle marche. Pour trouver ce petit déclic intérieur, il faut quelques fois insister mais il ne faut quand même pas trop la retoucher pour ne pas la fatiguer. Donc je la laisse un peu de côté jusqu’à ce que je sois certaine de ce qu’il faut que je fasse dessus. Quand elle décolle, c’est un moment magique qui n’appartient qu’à l’artiste.

Quelle est la première image qui vous a marquée et pourquoi ?

On vit dans un monde plein d’images mais celle qui me revient en mémoire remonte à mon enfance. C’est une image de forêt dans un livre d’une écrivaine grecque. J’ai oublié que j’avais lu cet ouvrage et j’en ai rêvé. On voyait des morts sur une colline, moi j’étais assise, toute petite, portant une couronne, et je regardais passer ces ombres. J’ai fait une peinture d’après cela, c’était la première fois que je peignais en couleurs. Une autre image importante pour moi, et qui est toujours dans mon atelier, est le tableau Cygnes reflétant des éléphants de Salvador Dalí. C’est une constante source de réflexion et d’émerveillement.

Image à la Une © Komili, Lotissement n°1. Huile sur toile, 90 cm x 90 cm (2018).

Kristina D'Agostin

Rédactrice en chef de Carnet d'Art • Journaliste culturelle • Pour m'écrire : contact@carnetdart.com

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