FILM « Los Nadie (les anonymes) » par Juan Sebastián Mesa.
Le cinéma colombien a toujours produit des films remarquables, surtout quand ses réalisateurs se penchent sur la société colombienne soit en mettant en exergue ses travers, soit quand elle en montre sa jeunesse sacrifiée.
Ici, le jeune réalisateur Juan Sebastián Mesa nous propose dans ce premier film très maîtrisé une plongée au beau milieu d’un groupe de cinq jeunes musiciens punk, jongleurs à Medellin. Le lieu n’est bien sûr pas anecdotique ni choisi au hasard puisque le réalisateur en est directement issu et connaît donc bien cette ville violente où il a vécu et qui est décrite ici comme un personnage à part entière.
Sa caméra vive et passionnée virevolte, s’attendrit sur tous ces personnages qu’il filme dans un magnifique noir et blanc parfois légèrement flou comme pour nous dire combien cette jeunesse a perdu ses repères. Cependant, chacun des personnages dit son espoir d’une vie meilleure. Tous aspirent à partir, à quitter cette « vida loca » et à rompre avec le monde adulte qui leur est promis. Plus qu’une histoire, il est ici question d’ambiance, de malaise parfois mais surtout d’énergie à travers une musique qui sous-tend leur angoisse ou leur désir.
Tout pourrait être un choix esthétique, mais il n’en est rien. Juan Sebastián Mesa a préféré nous faire vivre les contradictions et les rêves de cette fraternité d’une manière quasi documentaire. Tous ces amis nous deviennent proches parce qu’ils sont vivants et attachants, parce qu’ils veulent changer les choses et refuser le monde qui les entoure. Nous les suivons dans leurs pérégrinations et partageons leur envie de liberté. Et même si la scène finale nous montre que rien n’est jamais acquis et que la tragédie n’est jamais bien loin, nous sortons de ce film très réussi avec un goût à la fois amer et sucré à l’image de cette jeunesse colombienne qui ne peut se suffire de la médiocrité.
Image à la Une © Monociclo Cine.