Bettina Rheims

Les exclues.

EXPOSITION « Détenues » de Bettina Rheims jusqu’au 30 avril 2018 dans les châteaux de Vincennes et Cadillac, Vincennes.

BEAU-LIVRE « Détenues » par Bettina Rheims (photographies), préface de Robert Badinter, texte de Nadeije Laneyrie-Dagen aux Éditions Gallimard, 180 pages, 39€.

Dans des conditions de prises de vue compliquées, et avec l’autorisation préalable de l’administration pénitentiaire, Bettina Rheims a photographié des volontaires prêtes à accepter ce contrat. Elle les a parfois coiffées et maquillées (lorsqu’elles l’acceptaient) afin de leur permettre de retrouver une estime d’elles-mêmes en un lieu de rétention où elles demeurent souvent seules, déconnectées même de leur propre corps. Les photographies s’accompagnent d’un texte « Fragments ». Il s’agit d’une forme de fiction à partir d’un journal de tournage et faite d’une reprise des notes vocales que la créatrice enregistrait après chaque journée dans les prisons et les séances de prises de vue.

Détenues par Bettina Rheims © Éditions Gallimard.

L’image cherche à reconstruire des vies défaites que Bettina Rheims a pu connaître au moment des discussions préalables et pendant la saisie des éléments. De l’ensemble émane une continuité douloureuse mais latente. Les femmes ne sont plus les battantes que souvent l’artiste a saisi jusque là : on se souvient de sa précédente série sur les Femen.

Niniovitch II, novembre 2014, Roanne © Bettina Rheims.

La photographie devient une ponctuation minimale face au vide d’existence défaite. Elle refuse de faire vibrer l’écume d’un simple désordre émotif. La photographe ne cherche plus à suggérer des effets nostalgiques : elle joue sur les variations les plus simples pour tarir les sentiments inutiles et superflus. À ce titre, une telle œuvre dans son caractère quasi monacal ou ascétique ne risque pas gâcher le chaos : elle permet de le renforcer.

Photographie à la Une © Bettina Rheims, Eve Schmit II, novembre 2014, Roanne.

1 Comment

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    Répondre février 16, 2018

    Villeneuve

    Addenda . Robert Badinter fut l’élément déclencheur du projet . Il a longtemps demandé à Bettina Rheims quand elle irait photographier les femmes en prison ajoutant :  » Elles ont besoin qu’on les regarde  » . Bettina a écouté et lu les témoignages d’anciennes détenues exprimant la perte de leur féminité . Elles disaient :  » dès lors qu’on franchit les murs des prisons on n’est plus femme , par l’absence du regard de l’homme , le manque de soin , la malbouffe ou les pilules qu’on avale pour tenir  » .Les textes collent à ce qu’est la vie dans une prison avec ses douleurs et ses tristesses .
    Hommage au trio ( R.Badinter , B. Rheims , JPGP ) passeur de ces  » exclues  » qui trouvent inclusion dans notre regard bienveillant .

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