Chroniques d’une station-service

Plaisir d’essence.

LIVRE « Chroniques d’une station-service » par Alexandre Labruffe, Collection Verticales, Éditions Gallimard

Le pompiste héros de Labruffe tue le temps comme il peut. « L’azur, l’azur, l’azur » de Mallarmé n’est même pas pour lui une apostrophe. Et pour le souligner son créateur multiplie conte d’« essence » et fausse piste de vidange pour ce que Lacan impose un ordre : « Jouis, sans ». Il y a là une kyrielle d’intrigues qui n’en sont pas et des incidents érotiques peu enclins aux plaisirs à satiété. Leur recherche est souvent du temps perdu. En effet tant va l’homme au lit qu’à la fin il s’endort. Parfois même avant l’amour faute sans doute d’absence de dopamine ou autres hormones de croissance. Si bien qu’ « en voiture Simone » reste lettre morte et se conjugue à l’imparfait du subjectif.

Alexandre Labruffe © Francesca Mantovani/Gallimard .

Qu’importe en conséquence si ce narrateur est apparemment du genre bellâtre : « squelette d’athlète, crâne atypique, gourmette en or » qui en cas d’explosion de la station service deviendrait, du moins ses restes, un « trésor national […] exposé au musée des Arts premiers ». Face à lui la stratégie littéraire de l’auteur est donc simple : il vise à tromper l’ennui du misanthrope pompiste bien plus qu’un Sudoku pourrait le faire et en charmant le lecteur.

Dans ce but, il creuse « l’épicentre de la banalité contemporaine ». C’est là un commerce des plus roboratifs au moment où sur une telle aire de rien l’imagination est loin d’être en panne : proche des rocades et déviations, elle est déjantée. À la caisse des carburants, le narrateur faute de conversation, trouve ainsi dans les tours et détours de son auteur de quoi éviter tout ce qui pompe l’air et rend l’âme aride tandis que déesses et callipyges, tarzans et camionneurs lui tendent leur Carte Bleue sans amabilité.

Image à la Une © Collection Verticales, Éditions Gallimard.

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