PRESCRIPTIONS CULTURELLES
Les spectacles proposés durant la première partie de saison de la Scène nationale de Chambéry et de la Savoie dévoilent des arts résolument pluriels.
La Mini Spire & Horizon.
Chloé Moglia travaille dans un face à face avec le vide où corps et conscience fusionnent comme une quête de sens. Dans son approche aérienne de l’espace, elle interroge aussi bien le rapport au risque que l’incertitude d’être suspendu au-dessus du vide. La Mini Spire est le renouvellement de l’expérience du spectacle Horizon où Chloé Moglia évolue seule et explore le mouvement sur une perche à six mètres du sol.
Triple Bill #1.
Créé lors de la 18e édition de la Biennale de la danse de Lyon, Triple Bill #1 s’inscrit comme un trait d’union entre la France et le Japon. Kader Attou, Jann Gallois et Tokyo Gegegay s’associent pour proposer un programme de danse où les cultures dialoguent. L’univers chorégraphique de Kader Attou est à la fois empreint d’une ouverture sur le monde comme dans Douar ou Les corps étrangers et d’une poésie sensible qui engage les corps avec force comme dans Opus 14. Jann Gallois croise elle aussi les influences qu’elle puise aussi bien dans le hip-hop que dans la danse contemporaine en imposant une forte contrainte physique aux interprètes qui défient ici la gravité. Les danseuses de Tokyo Gegegay, dirigées par la chorégraphe Mikey, apportent quant à elles une touche de folie et d’excentricité qui font de Triple Bill #1 une proposition résolument plurielle.
Le Temps est la rivière où je m’en vais pêcher.
David Gauchard confronte le spectateur à des sujets qui poussent à la réflexion et à la prise de conscience personnelle tout comme collective. Suite à Inuk qui met en parallèle l’onirisme du grand Nord à la réalité contemporaine et à Le fils qui interroge le rapport et l’acceptation de l’autre dans ses différences, le metteur en scène construit sa nouvelle création en s’inspirant notamment de Walden ou la vie dans les bois écrit par Henry David Thoreau. Ce récit retrace l’expérience de ce poète et philosophe qui, pendant plus de deux ans, au milieu du XIXe siècle, a vécu en quasi-autarcie dans une cabane près d’un étang. Le Temps est la rivière où je m’en vais pêcher questionne le rapport au temps et à la nature dans nos sociétés, où tout va très vite, où l’urbanisation va croissante, tout en invitant le public à penser une relation différente au monde.
Critical Phase.
Tout au long de la saison Samuel Sighicelli propose un parcours en musique avec Marée Noire, Un Léger retour du ciel ou encore L’amour est un crime presque parfait. Critical phase est le premier rendez-vous donné par le pianiste et compositeur et voit deux musiciennes, Noémi Boutin et Claudine Simon, se débattre dans une partition dense où se mêlent sons instrumentaux, voix et électronique. Dans cette partition, les paroles sont comme des éléments de fiction qui permettent d’entrevoir les femmes derrière les musiciennes et inversement. Critical phase donne des clés pour écouter, parler et respirer d’une nouvelle manière.
Néant.
Le danseur et chorégraphe canadien se lance pour la première fois dans un spectacle en solo qui se révèle plein d’humour et profondément tragique. Dave St-Pierre crée des personnages radicalement opposés : une blonde à barbe hystérique et extravagante ou un homme maigre réservé et triste. Il se moque notamment de la danse contemporaine à travers différentes « parodies » d’Olivier Dubois, Pina Bausch ou encore Anne Teresa De Keersmaeker. Mais Néant est avant tout une performance hybride où la recherche du mouvement est permanente, où la beauté se déploie à partir d’un rien et où le vertige entre onirisme, violence et nostalgie est omniprésent.
X-Adra.
Elles sont des femmes syriennes exilées en Europe et en Turquie après avoir vécu l’enfer des prisons du régime syrien. Aujourd’hui, elles témoignent dans une pièce composée par le metteur en scène Ramzi Choukair et le dramaturge Wael Kadour. L’enfer de la détention et les mécanismes de déshumanisation s’entremêlent à la force de traverser les épreuves et à celle de survivre comme pour mieux dire tout l’espoir et la foi inébranlable en la liberté.
Image à la Une © Espace Malraux, Scène nationale de Chambéry et de la Savoie.