Du bon usage des sirènes.
LIVRE « Et des chansons pour les sirènes » par Lionel Bourg aux Éditions Le Réalgar.
Dans ce superbe livre, Lionel Bourg – tout récemment élu septuagénaire – se retrouve parmi les poètes et bien d’autres. Bref tous ceux qui l’ont accompagné et qui le suivent encore : Artaud, Rimbaud, Fondane, Breton, Saint-John Perse… Il a appris à devenir sculpteur de mots avec ceux qui à la rigidité des poses préfèrent la rigueur du langage. Chez lui il n’est pas un habillage mais une nudité attentive envers les choses et l’espace.
Lionel Bourg ne cesse de se frotter à des « lambeaux » de vie et d’émotions capables de générer l’utopie de la vision. D’où la nécessité de cet échange entre la poésie et le monde. Il reconstruit l’une et l’autre en des opérations dont le caractère expérimental est celui du jeu, de la fantaisie. Celles-là gardent comme « mise » non les formes mais la vie.
L’existence ne retourne jamais chez Bourg à l’état de spectre. Hors toute boursouflure, l’expérience lyrique – si nous pouvons l’appeler ainsi – n’est pas ostentatoire mais intérieure. Le monde est re-figuré dans un dénuement où jouent l’ombre et la lumière là où les couleurs (diaphanes, parcimonieuses) procurent une sidération par l’humour d’un verbe qui remplace le rouge du mercurochrome par le noir de l’écriture.
Dès lors qu’importe si les si reines sirènes soient plus replètes que sereines; l’avenir – à 70 ans passés – tient à ceux qui savent les caresser ou les déguster et pas seulement par le dos de la cuillère. Preuve que la poésie, lorsqu’elle est bien écrite, rameute les images primitives et sourdes de manière essentielle.
Image à la Une © Éditions Le Réalgar.