Finir en beauté

Communion funèbre.

L’espace est restreint, la lumière crue. Une petite communauté de spectateurs – de témoins ? De voyeurs ?  – prennent place en circulaire : la veille mortuaire commence.
Ni oraison, ni élégie, c’est bien d’une veille dont il est question.

Mohamed El Khatib fait revivre les dernières années de la vie de sa mère, Yamna Iouaj, emportée le 20 février 2012 par un cancer. Alors que son certificat de décès passe entre les mains hésitantes, les captations audios déferlent sur l’écran noir : pronostics médicaux, concertations familiales et parfois même, lointaine, étrangère, la voix de la défunte.

Entre fiction et documentaire, Mohamed El Khatib invite le réel au plateau. C’est un journal qu’il donne à entendre, une époque qui se rejoue : deux ans de la maladie d’une mère et l’absence, inéluctable, qui se profile. Et si Yamna est propulsée d’outre-tombe en personnage principal de cette pièce impudique, c’est son omniprésente absence qui rayonne. Orchestrant sources et témoignages, l’auteur s’amenuise sur la scène. Sa voix est basse, son corps statique. Le fils s’efface, ses émotions avec.

Ne subsistent que les traces tangibles, non de la mère, mais de sa maladie.

Finir en beauté est une fresque intime, minimaliste. Pourtant, et sans jamais céder au pathos, éclairant son récit de touches d’humour et de malice, El Khatib s’attache à dire l’universel : le deuil, la disparition, le passage à l’âge adulte.

Alors que l’auditoire se fait confident, on peut toutefois s’interroger sur la démarche. À ne vouloir dire que le réel, n’est-ce pas une certaine vacuité qui s’énonce ?

L’enterrement touche à sa fin, El Khatib disparaît brusquement. Il ne reviendra pas – ultime incarnation du départ.

Et l’on repart vaguement soulagé, peut-être même troublé de n’avoir pas été plus touché.

Image à la Une © Mohamed El Khatib / Anthony Anciaux – Fonds Porosus.

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