Perfidia

Perfidia

Festival du Cinéma Italien d’Annecy.

Tourné à Sassari, dans une Italie du Sud dépouillée, Perfidia met en scène la relation toute aussi dévastée entre un père et un fils incapables de se comprendre. Le long métrage d’Angius Bonifacio décrit la marche incertaine de ces deux hommes que l’absurdité de la mort a brusquement rapproché. Pippino est déjà âgé, trop usé par la vie pour se réinventer, et le récent décès de sa femme le confronte à une amère réalité : il ne connait rien d’Angel – son fils maintenant âgé de trente-cinq ans – et bien qu’ils vivent tous les deux sous le même toit, il ne sait rien de cette chaire presque inconnue que son amour lui a abandonné. « Quel âge as-tu ? Tu es né quand ? » demande-t-il alors sans ambages à Angel, dont la réponse lapidaire et dénuée d’émotion image cruellement l’incompressible barrière que le temps a érigé entre eux. Un désintérêt réciproque qu’Angel extrapole au sens de sa propre existence. Sans emploi et sans grand avenir, ce jeune homme un peu paumé passe le plus claire de son temps dans les bars sordides de banlieue en espérant que le bonheur viendra un jour frapper à sa porte. Le film d’Angius Bonifacio explore, avec une sincérité touchante et parfois désespéré, le vide au-dessus duquel se tend le lien fragile qui unit Pippino et Angel. La manière frénétique dont sont filmées les rues de cette petite ville de province italienne  – un complexe urbain et bruyant – exacerbe la fragilité des deux héros et la confusion presque palpable dans laquelle ils évoluent, sans jamais se toucher. Une impasse vers laquelle semble tendre toutes relations humaines dans un monde où bien et mal se confondent. Ombre menaçante de la crise, du chômage et de l’amour impossible, c’est dans cet univers sans espoir qu’Angel et Pippino vont devoir apprendre à cohabiter, à se reconnaître, et peut-être accéder ensemble à une forme incertaine de bonheur.

Malgré l’asphyxie qui entrave constamment les gestes et les confessions que s’échangent maladroitement les deux hommes trop longtemps étrangers, l’on ressent une certaine innocence dans la réalisation de Perfidia ; une naïveté tentée d’espoir dans ces prises du vue, où saturation de lumières et sursauts de l’objectif suggèrent la contemplation rêveuse de l’enfance. Angius Bonifacio signe ici un drama de qualité, concentré sur la relation père / fils, et repose l’éternelle dualité de la confrontation paternelle : reproduire le schéma du père, ou détruire son image.

NOTATION

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Killian Salomon

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