Tout un été sans Facebook

Enquête surréaliste dans les Rocheuses.

Roman de Romain Puertolas « Tout un été sans Facebook ». Éditions Le Dilettante.

Romain Puertolas continue son entreprise iconoclaste. Il faut donc toujours revenir à ses cours de miracles bourrées de lipides eu égard à l’embonpoint de son héroïne, maîtresse femme commissaire dont la gorge n’a rien à envier à celle du Colorado où se passe l’histoire.

Cultivant pour ses enquêtes un système d’association de mots et de pensée dans la veine surréaliste, la mégère vaguement apprivoisée ne craint pas les râteaux qui la médusent. Un tel système en effet n’est pas toujours propice et le Shérif de New-York en perd sa country en cette bourgade des Rocheuses habités de 150 âmes barrées et dont la population prend la fâcheuse habitude de se rétrécir plus eu égard aux meurtres qui s’y fomentent qu’à la présence d’un écureuil irradié qui hante les lieux.

Il y a là bien sûr un bar à basses, un dragueur de mimines. Et le lecteur prend un panard gothique dans ce qui tient d’un opéra pastille. Tel un soda inconnu le romancier offre non un faux rhum de hall mais une œuvre rare qui sent toujours l’huile de vidange et celle des sapins propres à servir de dernier garage à ceux qui passe à l’as hélas.

Puertolas est l’exemple parfait d’un irrégulier de la littérature policière. Et son apparent grand n’importe quoi demande un long et lent travail. Il porte la fausse imbécillité à l’état d’intelligence et de comique suprêmes. L’auteur ose des hybridations d’éléments particulièrement inaliénables. Elles suscitent une attraction irrépressible et transgresse tout édit de chasteté. Et si dans l’œuvre l’amour n’est forcément en fuite, il n’est non plus pas le souci majeur. Puertolas préfère d’autres derniers outrages là où le roman est moins policier que de langage.

L’écrivain omniscient fait place à l’histrion. Il peut vaincre le pire en rappelant que la vie n’est pas qu’un leurre et la mort un Shakespeare. Nous pouvons enfin entrer dans le non stratifié du nonsensique élevé à l’art le plus noble dans la mutation du logos. Au meurtre Puertolas préfère le ridicule. Ce dernier ne tue pas. Il fait mieux : il libère l’esprit de tout ce qui l’encombre et met en lumière le royaume de nos ombres. Font chorus quelques cris sans thème. Seules ancrées dans la nuit deux angéliques mélangent leur protubérance. Cela ne semblerait une aberrance que pour les abbés rances.

Image à la Une © Camille Cazaubon, Éditions Le Dilettante.

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